Alicia, Prima ballerina assoluta [BD]

Alicia, Prima ballerina assoluta [BD]

5 mai 2021 23 Par Bidib

Bonjour tout le monde, aujourd’hui c’est BD c’est même la BD de la semaine, et à mon tour je vais parler de Alia, prima ballerina assoluta d’Eileen Hofer et Mayalen Goust, sorti en avril chez Rue de Sèvres.

synopsis : Dans les rues de La Havane, entre 1959 et 2011, les vies se croisent et se recroisent. Aujourd’hui celle d’Amanda, jeune ballerine en devenir. Hier, celle de Manuela, mère célibataire, qui n’aura fait qu’effleurer son rêve de danseuse classique et enfin celle d’Alicia Alonso, dont on suit l’ascension vers la gloire jusqu’à devenir prima ballerina assoluta au parcours exceptionnel. Dans un Cuba où règnent la débrouille et l’entraide, tout autant que la dénonciation et le marché noir, l’histoire de la démocratisation de la danse classique rime singulièrement avec l’avènement du régime révolutionnaire. Pour Amanda, la compétition est rude pour être parmi les meilleures tandis que pour Alicia, les choix ne sont plus seulement artistiques mais politiques, lorsqu’on voudra faire d’elle un instrument de l’idéologie castriste. (source : Rue de Sèvres)

Avec cette bande dessinée, nous faisons un double voyage, dans le temps et l’espace. Elle nous amène à Cuba où nous suivrons deux destinées reliées par la danse classique. Celle d’Alicia Alonso, ballerine de renom qui au moment de la révolution cubaine va s’associer avec le gouvernement de Casto et servira la propagande du régime. Puis Cuba en 2011 avec Amanda, une jeune ballerine venue de province pour étudier dans l’école de dance classique fondée par Alicia et son mari Ferdinando durant la révolution. Pour Amanda, Alicia est le modèle absolu, la ballerine cubaine de renommée mondiale qui a continué à danser alors même qu’elle devenait aveugle.

Dans le Cuba des années 2010, tout le monde semble vénérer Alicia. Icône brandie dès que l’occasion se présente. Les professeurs de danse, les mères, tout le monde y va de son “prend exemple sur Alicia”. Elle est tellement vénérée que ça en devient indécent (et agaçant). Amanda et ses amies ballerines ne semblent pas du tout s’en lasser pourtant. Comme tout le monde, elles vénèrent Alicia et rêvent de pouvoir la croiser.

Tout en suivant Amanda dans sa nouvelle école, nous découvrons la vie d’Alicia 50 ans plus tôt. Elle devient fameuse pour sa sublime interprétation de Gisèle, puis, alors que la révolution éclate à Cuba, elle fait le choix avec son mari de rester dans son pays. Afin de rester dans les hautes sphères de la société, elle va se rapprocher du gouvernement castriste et se lancer dans la propagande en voulant populariser la danse classique.

En lisant les chroniques de mes camarades, j’avais retenu d’Alicia le talent et la volonté à toute épreuve. On surlignait le fait qu’elle ait continué à danser alors même qu’elle devenait aveugle et le personnage semble avoir autant fasciné les lecteurs que les protagonistes de la bande dessinée. Cela ne tarit pas d’éloges. C’est amusant, parce qu’en lisant à mon tour cette bande dessinée, ce n’est pas du tout ce que j’ai retenu du personnage. Oui, c’est une superbe ballerine, oui elle a fait preuve d’une incroyable autodiscipline et d’un talent étonnant pour la danse accompagné d’un travail acharné et d’une volonté de fer. Mais ce que moi j’ai retenu d’elle, en lisant cette bande dessinée, c’est un personnage antipathique, imbu de sa personne, raciste, prête à tout pour garder son statut social, même participer à la propagande d’un régime auquel elle ne semble pas du tout croire. Bref un personnage que je n’ai pas du tout aimé. C’est sans doute pour cela que la vénération excessive qu’on lui voue dans le Cuba des années 2010 m’a énormément agacé.

Mais est-ce que cela veut dire que je n’ai pas aimé cette histoire ? Pas du tout ! Bien au contraire, j’ai adoré. Et je trouve que la double facette d’Alicia en fait, en réalité, un personnage bien plus intéressant. Elle n’est pas l’être parfait que tout le monde vénère, elle a sa part d’ombre. Son comportement mérite d’être critiqué et c’est intéressant de voir comme il est complètement occulté par une propagande pro castriste à laquelle pourtant plus grand monde ne semble croire.

C’est aussi intéressant de voir comment Alicia s’est adaptée pour faire face à la révolution, si j’ai trouvé son comportement raciste (des noirs dans la danse classique, et puis quoi encore ? Faut pas exagérer) détestable (et c’est peu dire), j’ai trouvé ça intéressant de voir comment elle manipule le nouveau pouvoir pour garder son statut. Son mari me paraissait un personnage bien plus intéressant qu’elle, avec de vraies idées progressistes et pourtant il est complètement effacé par l’aura de sa fabuleuse (et odieuse) épouse.

J’ai beaucoup aimé suivre le quotidien d’Amanda dans le Cuba moderne, non seulement elle, mais aussi sa mère (qui semble être la seule personne convaincue par le système), Manuela, l’amie de sa mère qui travaille à l’hôpital le jour et dans cabaret la nuit, les deux prêtres… Bref, tous les personnages secondaires sont très intéressants et apportent une vraie profondeur au récit qui va au-delà d’une histoire de danse pour nous parler d’un pays singulier et de ses changements.

Une très belle histoire, qui nous invite au voyage et à la découverte, servie par un dessin simplement sublime. J’ai adoré le dessin de Mayalen Goust une fois encore. Fin, élégant, doux, avec des couleurs magnifiques, j’aime tout. J’ai pris beaucoup de plaisir à admirer les planches qui font de cette bande dessinée un objet aussi beau qu’intéressant.

Je ressors donc conquise de cette lecture, même si ce n’est pas tellement la danse qui m’a le plus intéressé dans l’histoire. Faut dire que je me passionne bien plus pour l’histoire que pour l’art, du coup j’étais bien plus sensible aux petites phrases glissées par les personnages secondaires à propos de tel camp ou tel évènement politique qu’à la vie de la prima ballerina assoluta dont j’ai retenu surtout les défauts.

https://www.francenetinfos.com/wp-content/uploads/2021/04/alicia-800x283.jpg

sur le site des éditions Rue de Sèvres

→ sur Amazon, BD Fugue ou chez votre libraire préféré

→ à lira aussi les avis de Tachan, Antigone et Soukee

→ Mayalen Goust (Instagram) ⇒ sur Ma petite Médiathèque : Vies volées, Kamarades tome 1


C’est mon choix pour la BD de la semaine

rendez-vous chez Stephie

Je participe aussi aux challenges Des Histoires & des Bulles (catégorie 8), au challenge Petit Bac (catégorie prénom) et au challenge Lire au féminin

petit bac 2021 lire au féminin


Le coin des curieux :

Alicia Alonso (danseuse) — WikipédiaAlicia Alonso

Si Amanda est un personnage de fiction Alicia, elle, a bien existé. Moi je ne connais rien à la danse classique alors son nom ne m’évoquait rien. Elle est pourtant la ballerine de renom qu’on nous décrit dans la bande dessinée. Née à la Havane en 1920, elle y est morte en 2019 (coriace la danseuse !).

Alicia a commencé ses études de danse à La Havane en 1931. A quinze ans elle épouse son partenaire Ferdinande Alonso. Elle étudie à New York, puis à Londres. Elle commence sa carrière de danseuse professionnelle en 1938 aux Etats Unis. Elle devient partiellement aveugle à l’âge de 19 ans mais cela ne met pas un terme à sa carrière. Elle continue la danse et intègre le New York City Ballet en 1940 ou elle est nommé étoile et travaille avec les plus grand chorégraphes. En 1948 elle fonde avec son mari le Ballet national de Cuba qu’elle dirige jusque dans les années 2010.

Share