Otona no Mondai – un yaoi de Ima Ichiko

13 décembre 2014 4 Par Bidib

C’est encore sous les conseils de a-yin que j’ai choisi de lire ce yaoi (non disponible en France). Je ne connais pas Ima Ichiko, mais elle me l’avais déjà conseillé et son récent article sur un autre de ses yaoi –Ashinaga Ojisantachi No Yukue – ma donné envie. (Oui, en ce moment je me fait une cure intensive de yaoi 😀 ). Et je n’ai pas été déçue. Bon ça n’a pas la classe d’un est em mais il y a dans ce titre une certaine originalité qui mérite d’être cité.

L’originalité est dans l’histoire, ou plutôt devrais-je dire dans les personnages principaux. En effet ici, chose rare pour un yaoi (c’est la première fois que je vois ça) le personnage principal n’est pas gay. Et non ! Le pivot autour du quel se déroule l’histoire est un jeune homme de 20 ans on ne peut plus hétéro. C’est son père qui est gay. Celui-ci annonce son intention de se marier avec un homme. (Au Japon le mariage entre personnes du même sexe n’est pas autorisé mais la question est détourné par l’adoption de l’un des partenaire par l’autre qui devient officiellement le fils adoptif. Je ne sais pas si la chose est vraiment rependue dans la réalité, mais ce type de “mariage” revient souvent dans le BL).

Non Seulement le personnage principal n’est pas gay, mais dans tout l’histoire le père est son jeune “mari” sont le seul couple homosexuel. Et ça, ça rend l’histoire beaucoup plus crédible ! Il y en a marre de ces yaoi où la terre entière est composée d’homo ou de mecs qui se disent “pas gay” mais qui comme par hasard tombent amoureux d’autres mecs (moi j’appelle ça être homosexuel, mais je dois pas avoir la même définition du mot que certaines mangaka, faut croire). Dans Otona no Mondai on a un cadre des plus vraisemblables. Et c’est l’intérêt premier de ce titre qui sort ainsi du lot et des stéréotypes du genre.

 

Revenons un instant sur l’intrigue : Naoto vit seul avec sa mère depuis le divorce de ses parents. Alors qu’il avait 5 ans ses parents décident d’un commun accord de se séparer : le père est gay. Mais il n’abandonne pas pour autant son enfant et c’est dans la bonne intente entre les deux ex-époux que Naoto grandi. Il a accepté sans trop de problème l’homosexualité de son père mais est très angoissé à l’idée que d’autres le découvrent. Il a peur de leur regard. Le jour où le père annonce son intention d’ »épouser » Gorou les angoisses de Naoto ne font que redoubler. Il veut tout faire pour convaincre son père de renoncer. Mais séparer les deux amants n’est pas aussi facile que ça. Finalement, au contact de Gorou , Naoto apprends à le connaitre, à l’apprécier en tant que personne et à souhaiter le bonheur de ce couple pas comme les autres. Mais pas question que tout le monde sache !

 

Toute l’histoire est traité avec humour. Les personnages ont tous des caractères plus pittoresques les uns que les autres. Ils sont drôles et attachants. J’ai beaucoup aimé la mère et son côté femme de caractère. Une vraie femme moderne. (dans un manga ? Si, si je vous jure ! Enfin, faut pas exagérer c’est quand même elle qui prépare les repas de son idiot de fils, non parce qu’à 20 ans, il peut pas se débrouiller, le pauvre choupinet). Avec cette belle brochette de personnages drôles mais ordinaires, Ima Ichiko n’a de cesse de créer des situation aptes au quiproquo et aux malentendus. La scène où le grand frère vient chez les Gorou pour la première fois afin de convaincre son frère de revenir à la maison et vraiment poilante. Un vrai vaudeville ! Si je n’ai pas ris à gorges déployées, j’ai trouvé ce titre très amusant.

Mais au delà de l’humour l’auteur aborde le sujet de l’intolérance et de l’acceptation. Contrairement à de nombreux titres, ici les personnages gay ne se posent aucune questions quant à leur propre homosexualité. Ils l’ont tout deux accepté depuis longtemps. C’est le regard des autres qui est au centre de cette histoire, notamment à travers Naoto qui malgré l’affection qu’il a pour son père et pour son nouveau « grand frère » est terrorisé à l’idée que d’autres découvrent son secret de famille. Il a peur d’être rejeté à cause de l’homosexualité de son père, ce qui met bien l’accent sur l’ampleur du tabou. Non seulement les couples homosexuels sont mal vu, mais c’est aussi préjudiciable socialement pour leur famille. (Moi j’ai beau ne pas comprendre ce genre de réactions face à l’homosexualité, je suppose que cela doit être une réalité, surtout au Japon ou la société est assez rigide, même le divorce est très mal vu). La réaction de Naoto face à l’homosexualité de son père n’est pas le seul événement à mettre l’accent sur la difficulté d’être homosexuel dans une société aux idées étriquées. La famille de Gorou fait également pression sur lui. La rigidité de la société japonaise est d’ailleurs mise en évidence par un autre événement qui lui n’a rien à voir avec l’homosexualité. Il s’agit d’un couple hétéro mais qui lui aussi, à sa façon, sort des canons habituels et il est pointé du doit à cause de cela (je ne vous en dit pas plus pour ne pas vous dévoiler l’intrigue). J’ai trouvé intéressant le parallèle qui est fait entre les deux situations. La problématique ici n’est pas tant l’homosexualité mais le manque de tolérance. Le tout est abordé sans mélodrame et beaucoup d’humour.

 

Une bonne lecture qui me fait découvrir Ima Ichiko. Son dessin m’est pourtant familier. Peut-être ai-je lu un autre de ses yaoi il y longtemps. En tout cas maintenant j’ai bien envie de lire Le cortège de cent démons.

Ah ! et la je me rends compte que j’ai complètement oublié de vous parler du dessin. Je l’ai trouvé beau, simple, délicat et expressif.

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